Budgets de l'État et de la Sécu : d'autres choix sont possibles

Rédigé le 30/10/2025

Les débats parlementaires se concentrent en ce moment sur deux thématiques importantes :

  • le budget de la Sécurité sociale (avec le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, « PLFSS »), principalement financé par les cotisations sociales, qui couvre les aléas de la vie : santé (assurance maladie), vieillesse (retraites), familles (CAF), autonomie, accidents du travail…
  • le budget de l’État (avec le projet de loi de finance, « PLF »), principalement financé par l’impôt, qui couvre le financement des services publics, le bien commun de toute la population.
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Au prétexte d’une situation budgétaire « catastrophique », le gouvernement propose dans les deux cas un projet d’une violence sociale sans précédent, encore pire que le budget Bayrou, faisant payer les plus démuni·es et les malades pour préserver sa politique de cadeaux aux grandes entreprises et aux ultra-riches.

Sécurité sociale : la cotisation doit reprendre toute sa place

L’objectif du gouvernement est simple : la destruction de notre modèle de Sécurité sociale. Le budget Lecornu est un véritable plan d’austérité contre les travailleur·ses et les plus précaires :

Des mesures qui frappent de plein fouet les salarié·es malades ou accidenté·es
  • limitation des arrêts maladie à quinze jours, avec nouvelle consultation obligatoire pour toute prolongation
  • restriction des arrêts longue durée (maladies les plus graves), sauf « situations aiguës » : une mesure qui exclura des milliers de malades, notamment atteint·es de troubles musculosquelettiques ;
  • limitation à quatre ans des arrêts pour accident du travail ou maladie professionnelle, alors qu’il n’existe aujourd’hui aucune limite ;
  • suppression de l’avis de la médecine du travail pour la reprise après un congé maternité ;
  • renforcement des contrôles patronaux sur les arrêts maladie, y compris par les médecins de l’employeur.
Des mesures qui augmentent la participation financière des patient·es
  • la création d’une participation forfaitaire sur les consultations des chirurgien·nes-dentistes, calquée sur celle des généralistes ;
  • une nouvelle franchise sur les dispositifs médicaux (lunettes, prothèses, pacemakers, pansements…) ;
  • la hausse des franchises médicales sur les transports de patient·es, aujourd’hui à 4 euros – le budget Bayrou prévoyait même de les doubler !
  • la ponction sur les mutuelles et complémentaires (qui sera forcément répercutée sur les contrats et donc sur les frais de santé des salarié·es et des retraité·es).
Des attaques directes contre les retraité·es et les plus précaires
  • après un gel pour 2026, les pensions seraient minorées de 0,9 point sous l’inflation en 2027 et de 0,4 point les deux années suivantes, grevant le niveau de vie des retraité·es, actuel·les et futur·es ;
  • cumul emploi-retraite « simplifié », en réalité pour obliger les retraité·es à retravailler afin de compenser la baisse de leurs pensions ;
  • suppression de l’abattement fiscal de 10 % sur les pensions : une double peine !
  • année blanche pour les prestations sociales : minima sociaux et prestations familiales ;
  • réduction des prestations des personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie
  • fiscalisation des indemnités journalières des personnes atteintes d’une affection de longue durée (ALD) et durcissement des critères d’accès.
Risque de maintien d’un énième projet de réforme de l’assurance chômage

Objectif : 3 milliards d’euros d’économies sur le dos des privé·es d’emploi.

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En réalité, il n’y a pas un problème de dépenses pour la Sécurité sociale, mais de recettes. Au prétexte de favoriser l’emploi, les gouvernements successifs ont favorisé les exonérations de cotisations sociales et limité les recettes, mettant en péril le financement de la Sécurité sociale.

La CGT a proposé un ensemble de mesures permettant de résoudre le manque de recettes, et de financer entre autres l’abandon de la réforme des retraites :

  • suppression progressive des 80 milliards d'euros d’exonérations de cotisations sociales dont 5,5 milliards qui ne sont pas compensés par l’État et qui participent aux trappes à bas salaires ;
  • mise en place d’une véritable égalité salariale femmes-hommes : au minimum 6 milliards d’euros ;
  • élargissement de l’assiette des cotisations pour y intégrer toutes les primes, l’intéressement et la participation : 4,4 milliards d’euros ;
  • augmentation du forfait social sur les dividendes (alignement sur les cotisations dites patronales) : 10 milliards d’euros minimum ;
  • lutte contre le travail illégal : manque à gagner de 6 à 8 milliards d’euros de cotisations retraites…


Lire aussi : Quel lien entre la fiche de paie et le financement des retraites par répartition ?


Retraites : une suspension en trompe-l’oeil

Le Premier ministre a annoncé une suspension de la réforme des retraites 2023, preuve que nous avons eu raison de ne jamais cesser de porter l’abrogation dans le débat public. Mais cette suspension n’est pas un blocage de la réforme à son stade actuel (62 ans et 9 mois pour 170 trimestres), elle n’est qu’un décalage d’un an de l’application de la réforme, les 64 ans étant exigés à terme pour les générations nées en 1969 et après, au lieu de 1968.

Si les générations 1964 à 1968 regagnent un trimestre sur la réforme (âge de départ et trimestres comptabilisés), la réforme est toujours là.

À ce stade, les départs anticipés pour carrière longue et pour les inaptitudes diverses ne sont même pas concernés par ce décalage.

De plus, le financement de ce décalage est programmé par une ponction supplémentaire sur les mutuelles et complémentaires et par une sous-indexation des pensions de retraites de 0,9 point sous l’inflation au lieu des 0,5 initialement inscrit au PLFSS : une deuxième année blanche et une « institutionnalisation » de la baisse des pensions de retraites, comme le veulent les libéraux.

Ne lâchons rien : exigeons un blocage comme étape pour l’abrogation, avant d’aller vers la retraite à 60 ans avec départs anticipés !

Budget de l’État : mettre en place un juste partage

Avec sa proposition de budget, le gouvernement vise à opérer une véritable saignée sur les services publics :

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Baisse du budget accompagnée de milliers de suppression de postes
  • 4 600 postes en moins dans l’Éducation nationale, alors que la ministre reconnaissait elle-même qu’il manquait 2 500 enseignant·es dès la rentrée et qu’en moyenne, chaque élève perd déjà près de 5 % de son temps d’enseignement du fait des absences non remplacées ;
  • 598 postes supprimés à Bercy, alors qu’un renforcement de la lutte contre la fraude fiscale est annoncé, que les rentrées fiscales se dégradent avec un manque à gagner de 70 milliards et que la forte baisse des effectifs entraîne une vague de suicides chez les agent·es ;
  • 1 098 postes supprimés chez des opérateurs d’État au ministère du Travail, en particulier France Travail, alors qu’aujourd’hui déjà bon nombre de conseiller·es sont supposé·es suivre chacun·e plusieurs centaines d’allocataires ;
  • coupes dans les budgets de la transition écologique, alors que pour chaque euros non dépensé aujourd’hui dans ce domaine, il en coûtera trois demain au budget de l’État selon la Cour des comptes ;
  • gel du point d'indice des fonctionnaires, qui va encore amplifier le décrochage de leur rémunération, alors que la France est désormais l’un des pays de l’OCDE qui les rémunère le plus mal. Résultat : il est de plus en plus difficile de recruter des enseignant·es, des infirmier·es, des aides-soignant·es… décuplant l’effet des suppressions de postes.
Hausse insuffisante du budget des hôpitaux

Il ne serait augmenté que de 1,6 %, alors que la fédération hospitalière de France estime l’augmentation « naturelle » du besoin de financement à 3,6 % et que la CGT chiffre entre 7 et 10 % l’augmentation nécessaire pour permettre au secteur de la santé et de l’action sociale de retrouver des marges de manœuvre. Plus de 20 000 lits ont déjà été fermé depuis la crise du Covid, et le fonctionnement en mode dégradé est devenu quotidien avec des catastrophes sanitaires à la clé.

Baisse du budget des collectivité territoriales

qui se traduit par une chute de l’investissement, impactant notamment le secteur du bâtiment et entraînant des coupes franches dans les secteurs de l’économie sociale et solidaire, la culture et le secteur associatif.

Logement social plus que jamais en danger

Le PLF prévoit une réduction du fonds vert de 500 millions et une baisse de crédit de l’Agence nationale de l’habitat de 700 millions, alors que 2,8 millions de ménages sont en attente.

Attaques sur la formation professionnelle

Suppression du financement par le CPF des bilans de compétences, et doublement de la participation des salarié·es au coût des formations proposées dans le cadre du CPF…

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Les services publics sont le bien commun de toute la population, le patrimoine de celles et ceux qui n'en ont pas, et cette attaque frappera en premier lieu les plus vulnérables. Une fois encore, rééquilibrer le budget de l’État est une question de recette, et nécessite de mettre à contribution celles et ceux que le gouvernement cherche à préserver avec son budget mortifère : les grandes entreprises et les ultra-riches.

  • les aides publiques aux entreprises privées constituent la première dépense de l’État : 211 milliards d’euros, sans condition à des critères utiles à la population ni contrepartie en matière d'emploi. Leur impact en matière d’investissements, de recherche, de transition écologique et d’emploi est inexistant, voire nul. Il est impératif de conditionner ces aides à des critères économiques, sociaux et environnementaux ;
  • les ultra-riches possédant 100 millions d’euros de patrimoine paient deux fois moins de prélèvements sociaux et fiscaux que le reste de la population. En France, 10 % des plus riches détiennent 60 % du patrimoine net ! La CGT est favorable à l’application de la taxe « Zucman », un impôt équivalent à 2 % du patrimoine pour ces 1 800 foyers fiscaux. De manière générale, elle revendique une véritable justice fiscale, avec notamment la baisse des taux de TVA, l’ajout de tranches à l’impôt sur le revenu, l’augmentation de l’imposition des successions pour les plus riches et le même taux d’imposition pour tous les revenus.

Le gouvernement doit cesser de faire des économies sur le dos des plus vulnérables, et prendre l’argent où il est : dans les poches du patronat !

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Tract budget 2026

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